Articles Les Gitans, Roms, Manouches

Huit ou dix mille gens du voyage s'installent dans le bourg camarguais. Gitans, Roms, manouches, ... Le peuple Gitan n'est pas « Un » mais divers. Essayons de nous y reconnaître.

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Les Gitans, Roms, Manouches

Huit ou dix mille gens du voyage s’installent dans le bourg camarguais. Observons que leurs caravanes ne sont pas disposées au hasard. Cette cité éphémère a ses avenues, ses venelles mais aussi 'ses quartiers' dont tous les occupants ont comme un air de famille. C'est que le peuple Gitan n'est pas 'Un' mais divers. Essayons de nous y reconnaître.

Si le nom de 'Gitan' est donné chez nous à l'ensemble des populations d'origine tsigane, il n'appartient légitimement qu'à un seul groupe, de loin le plus nombreux et le plus implanté aux Saintes Maries de la mer. L'Espagne fut longtemps leur pays de prédilection : leurs noms de famille en gardent la trace, comme leur dialecte : 'le kâlo', malheureusement en voie de disparition ... Les femmes sont brunes, les hommes ont le teint bazané. Ils se disent soit, 'Catalans', soit 'Andalous', suivant le lieu de leur principal établissement. On les trouve par dizaines de milliers dans le Midi de la France, où certains sont sédentarisés depuis plusieurs années, voire depuis plusieurs générations. Mais il y a aussi des bidonvilles Gitans, dont la population a décuplé avec l'arrivée de nombreux gitans établis en Afrique du Nord.

Ce sont les Gitans qui ont donné à l'Espagne le meilleur de l'Art Flamenco, mais aussi des danseurs célèbres (Luisiuo, Imperio Argentina, Carmen Amaya, Lola Florès et la Chunga), ainsi que des générations de grands toreros. Et à la France un guitariste inspiré : Manitas de Plata.

Les Gitans et le christianisme

C'est en ces termes que le Pape Paul VI accueillit en 1965, les Gitans venus de toute l'Europe et au milieu desquels il voulut célébrer son 68 ième Anniversaire. Nul vocable ne saurait mieux leur convenir. Déjà quand, à l'aube du XV~ème siècle, leurs ancêtres arrivèrent en France, ils se présentèrent comme des pénitents, condamnés à errer de par le monde en expiation de leurs péchés. Et, ils montraient, à l'appui de leur dire, des lettres du Pape Martin V. Pendant tout le Moyen-Age, ils demeurèrent fidèles au célèbre Pèlerinage de Saint Jacques de Compostelle.

De nos jours, plus que jamais, le Pèlerinage si bien adapté à leur nomadisme foncier reste l'acte religieux essentiel des Gitans. Le mauvais accueil qui leur est parfois réservé dans d'autres églises, où ils se sentent étrangers, les incite d'avantage encore à se retrouver entre voyageurs pour prier à leur manière et accomplir quelque voeu. Est-il dans la détresse, a-t-il un des siens malades, le Gitan fait un voeu à un Saint. Si c'est le Pèlerinage des Saintes Maries de la mer, il s'engage à l'accomplir dans de pénibles conditions de pénitence. Et ce voeu est tenu, le péril passé, coûte que coûte.

Qui n'a pas assisté, dans la semaine qui précède les Fêtes aux veillées gitanes dans la vieille église forteresse embrasée de cierges, ne saura jamais rien de la vraie ferveur gitane. La foule arrive, certains soirs, précédée des violons et des guitares. On allume au grand cierge Pascal, une multitude de petits cierges, que chacun fient haut dans sa main. On prie très fort, on clame des invocations, on présente les enfants à bout de bras devant les statues...

Durant le Pèlerinage de Mai, on enseigne le catéchisme dans les caravanes et bien des conversions intérieures se font dans le secret des coeurs. De nombreux Gitans profitent aussi de ce rassemblement familial pour faire baptiser leurs enfants, dans l'église des Saintes Maries de la mer. Si le temps n'est plus où les Gitans, venus par le train ou parfois à pied, passaient la nuit dans la crypte de Sarah, c'est toujours pour 'Leur Patronne' qu'ils viennent dans l'antique sanctuaire camarguais. Certes Marie -Jacobé et Marie Salomé tiennent aussi une place dans leurs coeurs. Ils les acclament lors de la descente des Châsses, et ne manquent pas de hisser jusqu'à leurs statues les enfants qui posent sur elles leurs mains et leurs lèvres. Mais c'est Sarah qui est 'Leur Sainte à eux'.

Chacun ajoute un cierge à la blanche forêt ardente qui répand dans la crypte une chaleur d'étuve. On glisse dans la boite réservée aux intentions, des linges d'enfants, d' humbles bijoux, de naïfs messages. Et puis on habille Sarah de neuf. Quarante, cinquante robes s'amoncellent sur la frêle statue qui grossit de jour en jour, et dont le fin visage pâlit sous les attouchements implorants et fervents.


Les Roms

Ce sont les plus aisément reconnaissables, car leurs femmes continuent à porter les traditionnelles jupes multicolores qui leur tombent jusqu'aux pieds et quand elles sont mariées, un foulard noué sur la tête. Les plus riches arborent des colliers de pièces d'or, qui constituent le trésor de la tribu. Beaucoup disent la 'bonne aventure', tandis que les hommes sont rétameurs, chaudronniers ou doreurs. Ces professions les incitent à résider dans les banlieues industrielles, notamment à Paris, Lyon et Lille.

C'est le groupe qui a le plus jalousement préservé son originalité : sa langue (proche du sanskrit), ses traditions, ses légendes. Après avoir traversé l'Europe Centrale, les Rom se sont aujourd'hui répandus dans le monde entier, du Canada à l'Australie et à l'Afrique du Sud.


Les Manouches

Les Manouches (et leurs cousins les Sinti), ne se distinguent guère que par la moustache -ou bien encore la petite barbiche caractéristique- qu'arborent la plupart des hommes. Les plus pauvres sont vanniers, et ont conservé les roulottes à chevaux ; les autres sont marchands forains ou récupérateurs de ferraille. Les Manouches ont longtemps séjourné en Allemagne et portent des noms germaniques (ex : Django Rheinhardt) ; les Sinfi conservent la marque de leur passage dans le Piémont (ex : la famille Bouglione). Tous ont une véritable passion pour la musique, et c'est parmi eux que se recrutent les virtuoses des célèbres orchestres 'tsiganes'.